Cela aussi passera.
Aujourd'hui allait être une longue journée. Je le savais avant même d'ouvrir les yeux, et dès que j'ai réalisé que mes yeux étaient ouverts, il était déjà trop tard.
À peine une nanoseconde plus tard, j'étais trempée d'une eau si froide que je savais que mon sang s'était momentanément figé. Je n'eus qu'une seconde pour digérer la situation lorsqu'on m'attrapa par les cheveux et me laissa tomber sur mes pieds. Comment tante avait-elle réussi à rendre la douleur si atroce, alors que j'étais en coupe basse, prouvait bien qu'elle était bien la première-née du diable.
« Combien de fois t'ai-je prévenue de te lever avant le lever du soleil ?! »
« Tantine, j'allais déjà me lever. »
« Tantine, j'allais déjà me lever », imita-t-elle d'une voix qui me rongeait les nerfs et qui ne ressemblait en rien à la mienne. « Quand est-ce que tantine a déjà aidé quelqu'un ? »
« Tata, s'il te plaît », suppliai-je, espérant qu'une once d'empathie se logeait dans son cœur froid et sombre. « Il est juste 16h05. Je vais immédiatement faire mes corvées. »
Elle resta silencieuse une seconde, et je pris cela comme un signal pour partir. Choquée mais heureuse de m'être échappée si facilement.
En passant devant elle, mon oreille était si tirée en arrière que je savais qu'elle bourdonnerait et piquerait pour le reste de la journée.
« C'est moi que tu quittes ?! » hurla-t-elle, des postillons s'échappant de partout. « Je ne t'ai pas déjà dit de ne pas me quitter ? »
« Tata, s'il te plaît… » suppliai-je à nouveau, tandis qu'elle m'entraînait hors de la pièce, me tenant toujours les oreilles, vers la cuisine, où je savais qu'elle gardait le fouet qu'elle avait commandé spécialement pour moi.
Elle siffla d'un ton venimeux, sans ralentir le pas. « Je t'apprendrai que tes oreilles sont faites pour entendre, pas pour décorer. »
Je continuai à supplier, même si je savais que mes supplications tomberaient dans l'oreille d'un sourd. Mais lorsque le premier coup de fouet s'abattit lourdement sur moi, je restai silencieuse.
Pas de larmes. Pas de mots.
J'étais calme. Réceptive. Presque dans l'expectative.
Cela aussi passera, me disais-je en mon cœur, comme je l'avais déjà dit un million de fois.
Même si je savais que c'était un mensonge.
Même si j'avais perdu tout espoir de liberté, bien avant d'avoir perdu foi en un homme belliqueux là-haut, miséricordieux et qui ne laissait pas le malheur arriver aux bonnes personnes.
Quiconque était là-haut, s'il y en avait un, se moquait probablement bien de moi.
Riant de l'orpheline pathétique qui avait osé espérer que la tante qui avait promis à sa mère mourante de la traiter comme sa propre fille le pensait sincèrement.
Oh, quelle idiote j'avais été.
Mais cela aussi passera
